Recueil des Œuvres poétiques
Édition originale rarissime de 1601 du Recueil des Œuvres poétiques de Bertaut (1552-1611), l’aumônier et le poète de la reine, Marie de Médicis (1575-1642), reliée aux armes de Marie de Médicis.
In-8 de (2) ff., 112 ff., vélin doré, semé de fleurs de lys dorées sur les plats et le dos lisse, armoiries dorées au centre des plats, tranches dorées, traces de lacets, minimes restaurations sur le plat supérieur.
Reliure de l'époque aux armes de la reine Marie de Médicis.
165 x 102 mm.
Bertaut, Jean (1552-1611). Recueil des Œuvres poétiques.
Paris, Par Mamert Patisson, 1601.
Édition originale du Recueil des Œuvres poétiques de Jean Bertaut (1552-1611) imprimé en 1601 si rare que James de Rothschild dut se contenter de la seconde édition parue en 1605 et que J. P. Barbier ne put se la procurer.
Brunet, I-815 ; Cioranescu, 3729 ; De Backer, 538 ; Guigard, I-94 ; Olivier, 2504 ; Quentin Bauchart, I-177 ; Viollet-Le-Duc, 357.
« Ancêtre des Précieux, pétrarquiste, Bertaut excellait aux pointes raffinées, aux strophes ténues, aux petits vers enrubannés et pimpants. « Brodés de fin caprice et de grâce câline », où Voltaire relevait « l'esprit délicat d'une nation ingénieuse ». « Je suis, écrivait Bertaut, une cire animée », Cire que de fleurs de souci / Les abeilles ont composée, / Et de fleurs de pensée aussi / Et de pleurs au lieu de rosée. Il se risqua dans un long poème, Timandre, sorte de drame, encadré dans une idylle, avec lequel La Princesse de Clèves de Mme de La Fayette offrira plus d’une ressemblance. On y trouve des vers pittoresques, que Racan, le 2 juil. 1635, dans un discours à l'Académie française, appelait « miraculeux », des accents de Corneille et le cri des héroïnes de Racine. Il tenta même la poésie semi épique avec son Hymne du roi saint Louis. Mais c'est surtout par « un certain accent lamartinien », qu'au jugement de Sainte-Beuve, de Brunetière et de Faguet, Bertaut mérite de survivre. Il donne bien la note de la souffrance et du regret : Le mal n’est guère grand qui se peut bien dépeindre / Et je sais mieux souffrir que je ne sais me plaindre. Il excelle aux élégies mélancoliques, il sait condenser sa pensée en une phrase nerveuse, traduire avec émotion la douleur, faire gémir ses vers en accords adoucis : Ignorez-vous encor qu'aux âmes désolées / Commander les chansons, c'est conseiller les pleurs. Ses poésies religieuses ont préludé, en quelque sorte, aux Harmonies et aux Méditations. Les stances de ses Psaumes sont supérieures à celles de Marot et de Desportes, dont Malherbe disait avec impertinence : « Votre potage vaut mieux que vos Psaumes ». De la paraphrase du psaume CXLVIII, où le prophète convie la création à glorifier Dieu E. Faguet a écrit : « C'est tout à fait une Harmonie de Lamartine. La forme est parfaite, et comme l’inspiration est très profonde, et que la puissance de développement, quoique abondante encore, se restreint en de justes limites, nous avons là une pièce classique vraiment admirable ». Malherbe, passant en revue Ronsard, Desportes, Régnier, d'Aubigné, a dit qu’il « estimait Bertaut le plus de toute la volée ». Boutade, sans doute, mais hommage peut-être à la fermeté ou à la mélancolie de la forme, à l'allure du mouvement, qui lui avaient servi. La cour la chantait ; les Solitaires de Port-Royal « la consacrèrent en la citant » ; M. de Sacy l'inséra dans son Commentaire de Job ; Mme Guyon en fit une application inattendue à l'amour de Dieu, et Sainte-Beuve constatait : « Nos mères les savent encore ». Mais Boileau a plus fait pour que le nom de Bertaut demeure, en l'introduisant dans son Art poétique, après un coup droit à Ronsard qu'il n'aimait pas : Ce poète orgueilleux, trébuché de si haut, / Rendit plus retenus Desportes et Bertaut. Il lui a fait encore justice par ce mot de son Traité du Sublime : « Bertaut a attrapé dans le genre sérieux le vrai génie de la langue française ». L'Académie partageait son sentiment. Car, « voulant, dit Pelisson, rendre notre langue capable de la dernière éloquence et faire un choix de tous les auteurs morts qui avaient le plus purement écrit, elle inscrivit, parmi les auteurs les plus célèbres en prose : Montaigne, Bertaut et François de Sales ».
Attaché à Henri III comme secrétaire du cabinet, il fut par la suite premier aumônier de la reine Marie de Médicis. Il fut nommé en 1606 évêque de Séez en Normandie et s’éteignit en 1611.
Le Recueil des Œuvres poétiques fut publié en 1601, imprimé par Mamert Patisson avec un privilège pour lui-même et pour Lucas Breyel, avec lequel il partagea l’édition. Celle-ci est ornée sur le titre de la marque d’imprimeur de Robert II Estienne (Renouard, n° 298), dont Patisson avait épousé la veuve et repris l’atelier.
Exemplaire réglé, relié aux armes de Marie de Médicis (1575-1642), fille du grand-duc de Toscane et de l’archiduchesse d’Autriche. Seconde femme de Henri IV qu’elle épousa par procuration le 5 octobre 1600, elle fut sacrée reine le 13 mai 1610, la veille de l’assassinat du roi et proclamée régente le surlendemain.
Les armes frappées sur le volume que nous présentons (Parti : au I, de France ; au II, coupé : au 1 Médicis et au 2 d’Autriche) ne sont répertoriées ni par Olivier ni par Guigard, mais ce dernier précise que cette princesse avait une bibliothèque dont les livres portaient des marques de formes diverses. Quentin Bauchart avait dressé une première liste d’ouvrages ayant appartenu à Marie de Médicis, liste complétée par d’Isabelle de Conihout et à laquelle il faut ajouter ce volume.
Précieux et superbe exemplaire sur papier fort relié en vélin doré fleurdelysé aux armes de la reine Marie de Médicis.
