Heures à l'usage de Rome

Tory, Geoffroy
1549.
Prix : 75 000 €

Les Grandes Heures de Geoffroy Tory ou de son atelier (1480-1533) conservées dans leur reliure en veau brun à compartiments décorés de l’époque imprimées à Paris en 1549.

L’exemplaire Yemeniz est incomplet de deux feuillets.

Folio a1, au-dessus de la marque de Regnauld Chaudière (Silvestre, n° 1142) : Horae in laudem beatissimae virginis Mariae, ad usum Romanum. Marque. Parisiis. Ex officina Reginaldi Calderii et Claudii, ejus filii. 1549. Au verso : Almanach pour 1549-1574. A la fin, au bas du fol. y8 : Si de Dieu veulx appaiser le courroux… [6 vers]… Finis.
In-4 caractères romains. Fig. en noir. 176 ff. [Bibl. nat. Réserve. B. 3159], imprimé en rouge et noir. Collation : a-y8. Titre dans un bel encadrement grave sur bois, chaque feuillet dans un cadre décoratif Veau brun, décor d'entrelacs et de filets courbes dores et peint a la cire verte, grise, et noire, dos lisse orne d'un décor a entrelacs doré, roulette sur les coupes, tranches dorées, restaurations en marge des deux derniers feuillets, le dernier venant d’un autre exemplaire. Complet. Précieuse reliure décorée et peinte de l’époque.

233 x 165 mm.

Tory, Geoffroy (1480-1533). Heures à l’usage de Rome. 1549.

« Un des livres d’heures les plus remarquables qui aient été publiés. Chaque page est ornée de larges et belles bordures gravées dans le style le plus pur et le plus parfait de la Renaissance.

Le volume contient en outre 14 grandes figures qui ainsi que les bordures sont sinon de Tory au moins des artistes de son atelier »
(Voy. Bernard : Geofroy Tory, 271).
Brunet V, 1662 ; Lacombe, 440.

Les grandes planches et une partie des encadrements avaient déjà été utilisées dans une édition publiée par Simon de Colines, en 1543.

L’édition des Chaudière, successeurs de Simon de Colines, renferme en plus deux encadrements complets qui n’avaient pas encore été utilisés.

« Cette particularité n’avait pas été remarquée par M. Bernard. Ce bibliographe n’a connu que deux exemplaires de l’édition de 1549. » (Bull. Morgand).

L’exemplaire Yemeniz et Lacombe est incomplet des feuillets y4 et y5 et contient 174 au lieu de 176 ff. Il provenait de la collection Yemeniz. L’édition est fort rare : sur près de 50 000 livres précieux décrits par le Bulletin Morgand, un seul exemplaire de ce livre d’Heures est décrit, en reliure moderne, porté au prix colossal de 3 000 F. Or en 1893, le Bulletin Morgand proposant alors des livres précieux à compter de 10 F. Or.

La comparaison des éditions successives publiées par Tory ainsi que la présentation de ses principales sources d’inspiration révèlent un corpus iconographique conséquent. L’étude comparative permet notamment d’éclairer le rôle de Tory dans le processus de fabrication du livre, en France à la Renaissance. Alors qu’il est connu en tant qu’auteur et traducteur, puis libraire et imprimeur, il « n’a vraisemblablement jamais été peintre, graveur ou relieur ». L’approche diachronique souligne les deux carrières de Tory et permet d’en apprécier la cohérence : régent auprès de plusieurs instances universitaires parisiennes de 1507 à 1513, il publie des ouvrages en latin à destination de l’enseignement et est amené à côtoyer les imprimeurs et libraires situés à proximité dans le Quartier latin. C’est ainsi qu’il aurait exercé les fonctions de prote auprès d’Estienne 1er. En 1523, il s’établit comme « marchand libraire » rue Saint-Jacques et débute une nouvelle carrière. Tory manifeste un intérêt très marqué pour la matérialité du livre, dont il cherche à améliorer la clarté, la lisibilité. Ses propositions concernent pour l’essentiel deux catégories éditoriales : le livre d’heures et le traité. Dès la première édition en son nom d’un Livre d’Heures à l’usage de Rome, imprimé par Simon de Colines (1525), Tory substitue à l’usage de la typographie bâtarde accompagnée de scènes gothiques l’emploi de caractères romains associés à des gravures au trait d’inspiration vénitienne, dites « à l’Antique ». Fondée sur l’abondance des blancs, sur les possibilités offertes par le placement en double-page des illustrations, cette recherche de cohérence visuelle manifeste l’influence des formes italiennes du livre – notamment la production d’Alde Manuce – avec lesquelles Tory a pu être en contact lors de son séjour sur place. Le programme iconographique fixé par Tory des gravures exécutées par Etienne Colaud vise à produire un effet marquant à la lecture. C’est ainsi que les Heures de 1525 vont devenir un référent visuel pour l’impression postérieure des manuels de dévotion en France, alors même que, dès 1527, Tory fait stylistiquement évoluer son dispositif (fusion des modèles vénitien et septentrional) de façon à l’adapter aux exigences de la clientèle parisienne.

« C’est seulement de ses livres d’Heures que nous devons nous occuper ici. En les examinant avec soin, on y reconnait les produits d’un art nouveau, déjà très remarquable dans l’édition de 1525, où se trouvent des encadrements et de grandes planches sur bois d’un genre tout particulier et fort gracieux, qui a été successivement perfectionné, surtout sous le rapport typographique, dans les éditions de 1527 et 1531. Cependant, malgré leur mérite réel, les admirables productions de cet artiste semblaient avoir été presque généralement méconnues : et c’est seulement de nos jours qu’on a su les bien apprécier. Aujourd’hui les curieux les recherchent avec le plus grand empressement et les payent, pour ainsi dire, au poids de l’or. Ainsi, tel exemplaire de ces charmantes Heures, qu’on aurait à peine vendu 12 à 15 fr. il y a une cinquantaine d’années trouve facilement acheteur aujourd’hui à 500 ou 600 fr., et même, comme on le verra ci-dessous, des exemplaires imprimés sur vélin ont été dernièrement achetés 3 000 fr. » (Brunet 1870).

Précieux et remarquable volume.