Description
Édition originale du Théâtre de Grévin
conservée dans sa reliure en vélin souple de l’époque.
Paris, 1562.
Grévin, Jacques. Le Théâtre de Jacques Grévin de Clermont en Beauvaisis, à très illustre et très haulte Princesse Madame Claude de France, Duchesse de Lorraine. Ensemble la seconde partie de l’Olimpe & de la Gelodacrye.
Paris, pour Vincent Sertenas. Et pour Guillaume Barbé. Avec privilège (1562).
Petit in-8 de (12) ff., 328 pp.
Vélin souple, titre manuscrit sur le premier plat, dos lisse, petite galerie de vers dans la première moitié du volume avec atteinte à quelques lettres. Reliure de l’époque.
163 x 120 mm.
« Edition originale, dédiée à Claude de France, duchesse de Lorraine » (Pierre Bérès, Des Valois à Henri IV, 1994, n° 137).
Picot, Catalogue Rothschild, I, n°711 ; Rahir, Catalogue, n°1365 ; Tchemerzine, III, 496 ; N. Ducimetière, Mignonne, allons voir…, n°106 ; Haag, V, 364-366 ; Soleinne, I, n°741 ; De Backer, Catalogue, I, n°341; Catalogue Herpin, n°163 ; P. Beres, Des Valois à Henri IV, n°136.
Seconde émission avec le titre de 1561 renouvelé à la date de 1562.
Le verso du titre est occupé par un portrait de Grévin à l’âge de 23 ans, gravé sur bois et attribué à Nicolas Denisot. Les 11 ff. qui suivent contiennent une élégie de Pierre de Ronsard.
Ce « volume rare » (Rahir) renferme la tragédie intitulée César première tragédie composée en alexandrins et premier modèle de tragédie régulière qui ait paru en France.
« Ouvrage fondamental de la littérature française » (N. Ducimetière).
« Plus encore que Jodelle et La Péruse, Jacques Grévin (1538-1570) peut être considéré comme l’un des fondateurs du théâtre français moderne : comme Garnier, il ne fit pas seulement représenter ses pièces, il veilla aussi avec soin à leur édition. Contrairement à ce que laisse supposer son titre, Le Théâtre de Grévin contient de nombreux poèmes : ils composent, d’une part, le second livre de L’Olimpe, où l’on relève de nombreuses imitations de Pétrarque et, d’autre part, le Second Livre de la Gelodacrye, davantage marqué par une inspiration protestante, avec notamment des sonnets sur le mépris des vanités mondaines.
Mais l’importance toute particulière du Théâtre vient surtout des trois œuvres dramatiques de Grévin publiées ici pour la première fois. Grévin avait débuté avec une comédie intitulée La Maubertine. La pièce avait été jouée au collège de Beauvais en 1558, mais n’avait encore jamais été publiée, bien que l’auteur en ait eu le projet. Un peu avant la paix du Cateau-Cambrésis, Henri II commanda au jeune homme, honneur inouï, une pièce pour le mariage de sa fille Claude avec le duc Charles III de Lorraine : ce fut une nouvelle comédie, La Tresoriere, histoire d’une femme adultère et cupide, représentée au collège de Beauvais, à Paris, le 5 février 1559. Deux ans plus tard, après son retour d’Angleterre, il donna, une troisième pièce comique, Les Esbahis, représentée une fois encore au collège de Beauvais en février 1561. Composées en octosyllabes, ces comédies adoptaient un style bas voulu par le genre. Grévin avait cherché à rendre ses personnages crédibles, en les faisant s’exprimer dans un langage familier adapté à leur position sociale. Pour Grévin, il ne s’agissait que d’un retour aux sources, en adoptant le style et la manière des auteurs comiques antiques. La comédie à l’italienne, récemment introduite en France, fut pour lui à la fois une source d’inspiration pour l’intrigue des Esbahis et un sujet de moquerie.
Dans un genre plus sublime, la seule tragédie de Grévin, César, écrite entre 1558 et 1561, marqua une étape fondamentale dans l’histoire théâtrale française : il s’agit en effet de la première tragédie composée en alexandrins. La pièce respectait aussi les unités d’action, de lieu et de temps, chères aux tragédiens antiques. Bien qu’il s’en soit défendu, l’œuvre devait beaucoup au Julius Caesar de Muret, représenté à Bordeaux en 1547. Mais, à l’inverse de son ancien maître, Grévin, tout en respectant la bienséance, évoqua l’assassinat du héros à travers le récit d’un messager »
(N. Ducimetière, Mignonne allons voir, n° 106).
« Publiée en 1561, l’édition fut remise en vente dès l’année suivante, avec la seule modification de la date sur le titre. Le verso de celui-ci est orné d’un portrait de l’auteur à l’âge de vingt-trois ans, gravé sur bois, attribué à Nicolas Denisot (I.F.F. XVIè, II, pp. 301-302) » (P. Bérès, Des Valois à Henri IV, 1994, n° 137).
« Grévin était le premier, sinon à composer (Jodelle et La Péruse l’avaient précédé), du moins à publier une tragédie et des comédies dans notre langue ».
La tragédie de César, notamment, est très réputée ; suivant Haag, « le progrès que cette pièce de Grévin tendait à réaliser était considérable et on peut supposer que sans nos malheureuses guerres civiles, les Mairet, les Rotrou, les Corneille seraient nés cinquante ans plus tôt. Dans la comédie Grévin n’est pas moins supérieur à ses prédécesseurs que dans la tragédie ».
Les exemplaires des plus prestigieuses collections littéraires ont été reliés au xixè siècle, ainsi les exemplaires des bibliothèques Soleinne (1843, I, n° 741), Rothschild (Picot, I, n° 711), Herpin (1903, n° 163), De Backer (1926, I, n° 341) et celui du catalogue Des Valois à Henri IV de la librairie Pierre Berès (1994 n° 137) ; quant aux exemplaires Rahir (1937, V, n° 1365) et Barbier (Ma bibliothèque poétique, IV-2, n° 51), ils sont en reliure du xviiiè siècle.
Précieux volume conservé dans sa reliure en vélin souple de l’époque à belles marges (hauteur 163 mm contre 161 mm pour l’exemplaire Bérès).